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Zone de Texte: Les Mains de Masseur

Obésité et Publicité :

si on ne s’entend pas, ça dure !

 

(Mai 2008)

 

Par Rouba Naaman

 

 

La mère de Napoléon disait souvent : « Pourvu que ça dure ! ». Mais, quand les choses ne changent pas, les gagnants gagnent toujours, et les perdants aussi.

 

Dans le domaine de l’obésité et de la publicité,

les perdants, ce sont nos enfants !

 

Le plan du ministère de la santé pour la lutte contre l'obésité infantile divise les industriels de l'agroalimentaire. Les réunions de concertations sur le retrait des sucreries en caisse et des publicités dans les programmes jeunesse ont été boycottées par plusieurs acteurs du secteur. Dénoncées par l'UFC-Que choisir, les entreprises ne critiquent pas tant le plan de la ministre que sa méthode.

Roselyne Bachelot a menacé de sévir. La ministre de la santé a annoncé, dimanche 13 avril 2008, qu'elle pourrait « prendre des mesures coercitives » pour lutter contre l'obésité infantile, dans le cadre du deuxième Plan national nutrition santé (PNSS2).

Elle a notamment rappelé à la table des négociations les entreprises du secteur agroalimentaire, absentes des réunions de concertation du mois de mars.

Nestlé, Danone, Auchan et Carrefour, entre autres, avaient boudé deux des trois réunions sur le thème de la suppression des publicités pour les produits gras et sucrés pendant les programmes télévisés pour enfants.

Ces discussions, qui réunissaient associations de consommateurs, distributeurs, annonceurs et industriels de l'alimentaire, portaient également sur la vente aux caisses des supermarchés de ces mêmes produits. L'absence la plus notable autour de la table du ministère est celle de l'Association nationale des industries alimentaires (ANIA), porte-parole du secteur.

Officiellement, les absents boycottent les réunions suite au refus de la ministre de les recevoir en privé avant les débats. Début février pourtant, Jean-René Buisson, président de l'ANIA, avait approuvé la démarche de concertation du ministère de la santé, insistant sur « l'état d'esprit positif et constructif de Roselyne Bachelot ».

Certes, l'ANIA a toujours exprimé ses doutes sur la pertinence du retrait des confiseries aux caisses, car « ce n'est pas aux pouvoirs publics d'organiser les linéaires de la grande distribution » selon Jean-René Buisson. Mais concernant la publicité pendant les programmes télévisés pour enfants, la fédération revendique au contraire une implication de longue date. Ce pourrait d'ailleurs être là la source du conflit.

Divisions au sein de l'ANIA ? Plusieurs entreprises membres de l'ANIA se sont engagées à retirer leurs publicités des programmes jeunesse, pour certaines depuis plusieurs années. Dans la foulée, l'association prévoyait de proposer « une position commune visant à stopper, de façon volontaire, toute communication sur les écrans ciblant les moins de 12 ans » pour tous les produits alimentaires à quelques exceptions près.

Pourquoi alors refuser de participer aux consultations du gouvernement ?

« Nous avons de bonnes raisons de croire qu'il y a eu des désaccords au sein de l'ANIA, certains industriels ayant pris l'initiative courageuse de retirer leurs produits des spots télévisés, alors que d'autres ne veulent pas renoncer à la manne publicitaire» affirme Olivier Andrault, chargé de mission alimentation à l'UFC-Que choisir.

L'association de consommateurs craint même que la réunion privée avec Roselyne Bachelot ne soit qu'un moyen pour l'ANIA de faire pression sur le gouvernement.

Un chantage à la délocalisation, ou à l'emploi ?

« Absurde » répond Cécile Rauzy, secrétaire générale du Syndicat du chocolat, qui regroupe une cinquantaine d'entreprises, dont plusieurs grands groupes, et représente près de 95% de la production de chocolat en France. « Ce n'est pas notre état d'esprit. Nous sommes des entreprises responsables et la nutrition fait partie de nos priorités ».

Après concertation et avec l'accord de l'ensemble de ses adhérents, le Syndicat du chocolat a retiré ses publicités des programmes pour enfants en 2006. La démarche avait été initiée par les décisions individuelles de plusieurs industriels, notamment Kraft France et Ferrero, de cesser les publicités à destination des enfants, dès 2004.

Dialogue de sourds et discussions stériles. Le Syndicat du chocolat a pourtant refusé de participer aux réunions de concertation, « par principe ». En cause, la forme, et non le fond, du plan de la ministre de la santé.

« Nous travaillons sur ce sujet depuis 2006. A partir de septembre 2007, nous avons demandé à être reçus par Roselyne Bachelot pour lui faire nos propositions. Elle n'a jamais répondu favorablement » regrette Cécile Rauzy.

Aujourd'hui, alors que le lien entre obésité infantile et publicité revient à l'ordre du jour, les industriels se sentent exclus du processus de réflexion. « Le ministère nous invite à discuter des modalités d'application des propositions, et non de leur teneur » insiste Cécile Rauzy. Le syndicat a rendez-vous fin avril avec Roselyne Bachelot pour lui proposer son plan. Des divisions, il pourrait également y en avoir à la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution (FCD).

Les magasins E.Leclerc ont en effet annoncé, à grand renfort de communiqués, le retrait des confiseries aux caisses de ses supermarchés dès le mois de juin. Si cette décision fait suite à une demande expresse du ministère de la santé, elle ne réjouit pas du tout les industriels du secteur. La majorité d'entre eux reprochent au groupe de profiter d'un effet d'annonce, alors que l'efficacité de cette mesure n'est pas prouvée.

« Une étude montre que seul 13% des parents font leurs courses avec leurs enfants, dont seulement 6% achètent des bonbons au niveau des caisses » explique Cécile Rauzy. L'impact de ce retrait serait donc limité, et les industriels disent vouloir proposer d'autres mesures plus efficaces. En attendant, l'UFC-Que choisir regrette vivement l'absence des industriels lors des débats.

« Nous avons continué à travailler avec les médias, qui n'ont malheureusement pas fait de propositions très concrètes. L'absence des entreprises de l'alimentaire et de la distribution appauvrit la discussion » regrette Olivier Andrault.

L'association de consommateur aurait préféré entendre individuellement l'opinion de chaque industriel, indépendamment des fédérations. « Nous n'avons pas été invité officiellement » se justifie Yoplait.

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La preuve de ces incompréhensions entre les différents secteurs se trouve dans les publicités des hypermarchés, qui font la promotion de certains produits avec la notion de « ne mangez pas trop gras, trop sucré, trop salé » ou « bougez plus, faîtes du sport ».

C’est bien la preuve que les commerçants veulent d’abord vendre,

avant de s’intéresser à la santé de leur clientèle !

 

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